Au Maroc, la réforme annoncée du code de la famille suscite l’espoir des défenseurs des droits des femmes

Au Maroc, la réforme annoncée du code de la famille suscite l’espoir des défenseurs des droits des femmes

Pour le mouvement de défense des droits des femmes au Maroc, tous les espoirs sont permis. Le royaume chérifien s’apprête à réviser la Moudawana, son code de la famille, vingt ans après la réforme phare du début du règne de Mohammed VI qui visait à consacrer l’égalité des droits entre les hommes et les femmes – jusqu’alors condamnées à une vie sous tutelle masculine – mais dont les associations féministes n’ont cessé de pointer les lacunes. Le roi a appelé le gouvernement à s’emparer du sujet. Le 26 septembre, il lui a donné six mois pour soumettre des propositions d’amendements.

Le projet de faire évoluer la Moudawana avait déjà été introduit par le souverain en juillet 2022 à l’occasion de la Fête du Trône. « Le code de la famille a représenté un véritable bond en avant. Désormais, il ne suffit plus en tant que tel », avait-il déclaré. En tant que commandeur des croyants, Mohammed VI avait également fixé le périmètre de la réforme, qui ne peut enfreindre les textes coraniques formels : « Je ne peux autoriser ce que Dieu a prohibé, ni interdire ce que le Très-Haut a autorisé. »

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L’équation s’annonce complexe dans les concertations qui s’ouvrent au Maroc, pilotées par le ministère de la justice et le pouvoir judiciaire, tant le code de la famille est sujet aux confrontations idéologiques. D’un côté, les associations féministes sont en ordre de marche pour obtenir des avancées réelles, saisissant l’opportunité de l’impulsion royale et d’un gouvernement réputé plus libéral après dix ans de pouvoir du parti islamiste (2011-2021). De l’autre, des voix, politiques et religieuses, plaident pour le statu quo au nom de la défense des fondements identitaires du Maroc.

« Si le roi a manifesté son souhait de poursuivre l’élan réformateur, il est illusoire de penser qu’il peut décider de tout, relève le politologue Mohamed Tozy. Son choix de responsabiliser les acteurs est en soi une recommandation aux magistrats d’avoir une lecture plus éclairée de la loi, aux oulémas [théologiens] d’aller plus loin dans l’exégèse. Mais la monarchie doit composer avec des forces conservatrices très fortes. Ce sont ces rapports de force, et l’ingéniosité des acteurs à les faire évoluer, qui détermineront le plafond de la réforme. »

« Certains nous traitaient de mécréantes »

Il y a vingt ans, la Moudawana avait divisé la classe politique autant que la société tout entière. Quelques mois après l’intronisation de Mohammed VI, un plan gouvernemental pour « l’intégration de la femme » avait suscité des débats tournant parfois à l’affrontement. Le 12 mars 2000, deux manifestations – l’une à Rabat à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, l’autre à Casablanca, dirigée par les islamistes – avaient porté ce clivage à son paroxysme. Dans la foulée, le roi avait nommé une « commission consultative chargée de la révision de la Moudawana », dont les propositions allaient servir de base au projet final adopté par le Parlement en 2004.

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