« Malgré toutes les images insoutenables en provenance de Gaza, il n’y a pas de réaction »

Philippe Lazzarini, commissaire général de l’UNRWA, l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, réagit au cap franchi dans la violence des bombardements israéliens contre la bande de Gaza et dénonce l’assimilation dangereuse de la population palestinienne de l’enclave avec le Hamas.

Il était, samedi 28 octobre, l’invité d’Internationales, émission de TV5 Monde présentée par Françoise Joly, et dont Le Monde est partenaire.

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Quelle est la situation dans le territoire de Gaza après les frappes israéliennes de cette nuit ?

Le directeur de nos opérations dans le sud de Gaza – le seul membre de notre personnel que nous avions pu joindre ce samedi matin, par liaison satellitaire, alors que téléphone et Internet ne fonctionnent plus – dit : « On n’a jamais entendu, de mémoire, des bombardements d’une telle intensité. » Nous avions pourtant déjà eu l’impression, au cours des derniers jours, que l’on avait atteint un paroxysme en matière d’intensité.

Il y a eu des frappes contre la partie septentrionale, à Khan Younès [dans le sud de la bande de Gaza], où se trouvent énormément de déplacés abrités dans les installations de l’UNRWA. Les vingt jours de guerre précédents ont déjà eu des conséquences désastreuses pour la population, avec des centaines de milliers de déplacés, des milliers de morts, encore plus de blessés, dans une bande de Gaza sous blocus total, où il n’est pas possible d’apporter une aide humanitaire suffisante.

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S’ajoute maintenant une atmosphère d’anxiété, de panique, avec la peur qu’il y ait de nouveaux mouvements de population. Les 300 000 à 400 000 habitants qui sont encore dans le Nord ont de nouveau été sommés, vendredi, par l’armée israélienne, de se déplacer en masse vers le Sud. Il est évidemment impossible de se déplacer lors de bombardements intenses. Notre crainte est que, une fois dans le Sud, les populations soient encore poussées davantage, près de la frontière égyptienne.

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L’UNRWA essuie des pertes colossales depuis le début de la guerre lancée par Israël contre Gaza, qui a fait suite à l’attaque sanglante du Hamas contre Israël, le 7 octobre. Nos employés vivent dans les mêmes conditions que le reste de la population, ils font partie des déplacés partis dans le Sud. Certains ont pu rester dans le Nord, par choix personnel, comme d’autres civils. Mais nos opérations se déroulent aujourd’hui dans le Sud.

Depuis le début de la guerre, 57 membres de nos équipes ont été tués (selon les chiffres disponibles vendredi). C’est insoutenable. Nous avons à Gaza 13 000 employés, dont 2 000 qui travaillent pour la réponse d’urgence. Ce sont tous des réfugiés palestiniens, excepté une petite équipe d’internationaux. Si je compare avec la Syrie, l’UNRWA y a perdu 17 employés en plus de dix ans de guerre.

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